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Les chasseurs ne prélèveraient pas les oiseaux en fonction de leurs caractéristiques morphologiques selon une étude publiée par l’OFB

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L’Office français de la biodiversité, en collaboration avec l’Ifremer et l’institut de recherche sur les zones humides la Tour du Valat, vient de publier une étude scientifique visant à déterminer si la chasse des oiseaux en Europe vise plutôt certains individus sur la base de leurs caractéristiques morphologiques. La présence ou non de prélèvements sélectifs peut en effet profondément affecter les conséquences du prélèvement pour les populations concernées.

Chez les mammifères ou les poissons, il est fréquent que les chasseurs et les pêcheurs prélèvent de manière préférentielle certains individus plutôt que d’autres, selon leur taille, la longueur de leurs cornes, etc. De nombreux exemples montrent que cette pratique peut entraîner un changement des caractéristiques morphologiques des individus au sein des populations exploitées, par exemple des poissons de plus en plus petits, des éléphants dépourvus de défenses ou encore des cornes réduites chez les mouflons. Dans la très grande majorité des cas, cela résulte d’un choix intentionnel de sélectionner certaines caractéristiques, que ce soit pour des raisons esthétiques (ex. trophées de chasse) ou économiques (ex. pêche industrielle).

Hormis des différences de plumages pouvant exister entre mâles et femelles ou entre classes d’âges, les oiseaux semblent au contraire assez similaires entre eux. Par ailleurs, de nombreux modes de chasse, comme la chasse de nuit ou à la passée, ne permettent pas de distinguer des différences subtiles. Pourtant, il a été mis en évidence chez certaines espèces que les chasseurs sélectionnent de manière non-intentionnelle les individus selon leur morphologie et leur comportement. Des études préalables conduites dans des zones géographiques restreintes suggèrent par exemple que les chasseurs prélèvent les oiseaux les plus maigres au sein d’une population de canards, les oiseaux en moins bonne condition corporelle étant visiblement plus à risque de s’exposer pour s’alimenter dans des zones chassées.

Comment a été menée l’étude ?

En compilant de très importantes bases de données collectées lors de la capture d’oiseaux, les chercheurs ont comparé les mesures telles que la longueur des ailes ou des pattes, le poids et la condition corporelle des individus, selon qu’ils étaient ou non prélevés à la chasse ensuite.

Près de 212 000 individus mesurés entre 1953 et 2020 en France ont été analysés, regroupant 7 espèces : canard colvert, sarcelle d’hiver, bécassine des marais, fuligule milouin, fuligule morillon, merle noir et foulque macroule.

Résultats : aucune différence entre la morphologie des oiseaux morts à la chasse et les autres

Même si des différences morphologiques usuelles ont été retrouvées (mâles souvent plus grands que les femelles, variations saisonnières importantes de la masse corporelle au cours de l’hiver, etc.), aucune différence significative n’a été mise en évidence entre la morphologie des oiseaux signalés morts à la chasse et les autres.

Il n’existe donc aucun élément tangible suggérant que les chasseurs prélèvent les individus selon leurs caractéristiques morphologiques, même de manière non-intentionnelle.

La chasse aux oiseaux ne semble donc pas être une source de sélection « non naturelle » sur l’évolution de leur morphologie, ou alors cette sélection s’est déjà opérée. Néanmoins, il est possible qu’une sélection s’exerce non pas sur les critères morphologiques mais sur le comportement de certains individus. Un critère souvent utilisé est le caractère explorateur ou timide des individus qui va influencer leurs déplacements et faire varier leur exposition aux zones chassées. Les liens entre traits de personnalité et dynamique des populations sont une voie de recherche prometteuse mais jusque-là encore peu explorée.