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Liste rouge des espèces menacées en France : vigilance pour les poissons récifaux de La Réunion

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Dans les eaux récifales de La Réunion, la situation des poissons marins appelle à une vigilance renforcée. Pour la première fois, l’examen complet réalisé montre que 36 espèces sont menacées et 23 autres quasi menacées. L’état des lieux indique également que 42 % des espèces ne sont pas encore assez connues pour déterminer leur situation.

Publiés dans le cadre de la Liste rouge des espèces menacées en France, ces résultats sont issus d’analyses coordonnées par le Comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), l’Office français de la biodiversité (OFB) et le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN), réalisées avec l’implication d’un groupe de spécialistes issus du GIE Marex, de Galaxea, de l’IRD, de l’Ifremer et de la Réserve naturelle marine de La Réunion.

L’état des lieux a porté sur l’ensemble des 732 espèces de poissons récifaux vivant dans les eaux peu profondes de La Réunion, jusqu’à 50 m de profondeur, à l’exclusion des espèces de haute mer, des requins et des raies.

Pression de la surpêche

De nombreuses espèces sont prisées pour leur chair et présentent une grande valeur commerciale. C’est le cas des mérous, très sensibles à la surexploitation du fait de leur maturité sexuelle tardive et de leur grande longévité. Le Mérou demi-lune et le Mérou patate sont ainsi classés respectivement "En danger" et "En danger critique". De petits mérous, appelés macabits, sont quant à eux recherchés pour la pêche traditionnelle à la gaulette qui se pratique avec une canne de bambou. Le Mérou gâteau de cire est l’espèce phare de cette pratique de pêche et se trouve classé "Quasi menacé". Au total, le bilan montre que 12 espèces de mérous sont menacées à La Réunion, dont la moitié sont désormais "En danger critique".

D’autres espèces particulièrement ciblées par la pêche sous-marine ont vu leurs effectifs diminuer de manière importante au point de devenir rares, à l’image du Perroquet bleu, du Vivaneau maori ou du Vivaneau chien-rouge, tous trois classés "Vulnérables".

Dégradation de la qualité des habitats récifaux, pollutions et réchauffement climatique

De manière générale, toutes les pressions qui affectent l’écosystème des récifs coralliens touchent également les poissons récifaux. Les effets cumulés de l’urbanisation croissante du littoral, des pollutions agricoles et des apports terrigènes liés aux ruissellements conduisent en particulier à une dégradation importante et chronique de la qualité des eaux côtières. Dans le même temps, le changement climatique à l’origine du blanchissement des coraux vient perturber les habitats récifaux.

Certains poissons inféodés au corail vivant, tels que les poissons-papillons, sont affectés par la détérioration de leur habitat, notamment par la disparition des coraux branchus qu’ils affectionnent. Le Poisson-papillon à chevrons figure ainsi dans la catégorie "Vulnérable". D’autres espèces vivent en relation étroite, dite de "mutualisme", avec des anémones de mer qui subissent les effets des pollutions, de l’urbanisation côtière et du changement climatique. C’est le cas du Poisson-clown de Maurice, victime de la régression des anémones dont il dépend, au point qu'il se trouve aujourd’hui classé "Vulnérable".

Certains poissons dépendent quant à eux des herbiers de plantes marines, qui couvrent moins d’1 ha à La Réunion et qui subissent les effets des pollutions et de la surfréquentation par les usagers, tels que la Longue girelle ou le Perroquet marbré, tous deux classés "Vulnérables". D’autres sont restreints à des habitats très localisés, comme l’Hippocampe d’estuaire qui ne se rencontre que dans les ports en eaux troubles ou turbides, classé "Vulnérable" et menacé par la pollution et les aménagements portuaires.

Des défis pour l’avenir

L’état des lieux révèle également un manque d’informations pour de nombreuses espèces. Plus de 40 % des espèces de poissons récifaux restent encore mal connues à La Réunion et ont dû être classées en catégorie "Données insuffisantes". Le renforcement des connaissances apparaît donc essentiel pour préciser la situation de l’ensemble des poissons rencontrés dans les eaux réunionnaises.

Au terme des analyses, les résultats montrent en particulier l’importance d’améliorer la gestion de la pêche et de développer des zones de protection forte en mer. Plusieurs espèces continuent d’être surpêchées au point que certaines sont aujourd’hui menacées, alors que des mesures appropriées de gestion adaptative et de promotion d’une pêche raisonnée permettraient un rétablissement de leurs populations. La Réserve naturelle nationale marine joue à cet égard un rôle important pour favoriser la capacité des espèces à se régénérer, à grandir et à se disséminer vers les zones voisines pour la reconstitution et le maintien des populations. En particulier, les zones de protection renforcée au niveau du récif sont de précieuses solutions de conservation, qui ont montré leur intérêt pour les espèces inféodées à ces milieux. En parallèle, la protection des habitats littoraux et la lutte contre les pollutions issues des terres sont essentielles pour préserver la qualité des eaux côtières et la bonne santé des écosystèmes récifaux.

La Liste rouge permet d’identifier les priorités et de guider les réponses à apporter pour ne pas voir disparaître des espèces de poissons emblématiques des récifs de La Réunion.

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